Stratégies de developpement d'une filère crevetticulture durable au Cameroun
Le Cameroun, pays d’Afrique central dont le nom vient du mot « camaroes/camarones» (en portugais/espagnol qui signifie crevettes) ne dispose cependant d’aucune industrie d’élevage de crevettes pourtant, dispose d’énormes potentialités favorables au développement de ladite industrie. Ce n’est qu’en 2006, sous l’égide des chefs traditionnels de la côtes (le chef Bakoko ; S.M Salomon Madiba) en association avec l’association humanitaire Bleu Cameroun (Annie Trochery), en partenariat avec l’entreprise équatorienne Concepto Azul S.A et française Vige International S.A qu'un projet pilote d’élevage des crevettes au bénéfice des communautés locales a été initié à Kribi.
L’élevage des crevettes est un composant important dans l’économie des pays intertropicaux de l’Asie du Sud-Est, de l’Amérique centrale et du Sud. Cette activité industrielle fournie approximativement 30% de la demande des crevettes dans le marché mondial, avec une production totale annuelle estimée à 712000 tonnes métriques.
L’industrie a connue une croissance importante pendant les années 80s avec un développement technique rapide et une énorme augmentation du nombre d’écloseries et de fermes. L’intensification de l’élevage des crevettes a été basée sur le progrès dans l’élevage mais a souffert du manque de connaissance de la physiologie des Penaeides et une mauvaise considération des aspects écologiques.
Depuis 1992, la production a commencé à chuter créant des problèmes importants : Plusieurs familles et fermes industrielles de crevettes tombent en faillite, créant le chaumage et la famine car dans les zones côtières pauvres, la crevetticulture joue un rôle particulièrement important dans la réduction de la pauvreté et de la faim en milieu rural. Les problèmes écologiques font partie des raisons de cette chute. Ce sont les formes de surpêche, la détérioration de l’environnement à travers la pollution industrielle, agricole et aquacole, la destruction des forets de mangrove et souvent la mauvaise gestion. Par ailleurs, les maladies endémiques et épidermiques ont affectées de manière dramatique la production.
Les agents responsables des maladies chez la crevette sont principalement les virus et les bactéries appartenant à la famille des Vibrionacea. Ces pathologies entravent particulièrement la production des larves et entraine des mortalités et par conséquent des problèmes chez les géniteurs. Finalement, la pratique du transfert des crevettes vivantes au niveau national et international sans quarantaine ou autres protocoles de sécurité a contribué à l’expansion des maladies qui deviennent endémiques.
Des pertes totales annuelles dues aux maladies ont été estimées à environ US$ 3 milliards. Les maladies non infectieuses sont souvent suspectées d’être la conséquence de la dégradation de l’environnement exacerbé par les pratiques de gestion. On suggère que les maladies infectieuses et non infectieuses se mêlent au maintien de l’industrie globale des crevettes même. Par conséquence, la prévention et le control des maladies se sont avérés prioritaires pour une production de crevettes économiquement et écologiquement rentable (viable).
Dans le but de se défendre contre les agents pathogènes envahissant, les crustacés en général et les crevettes Pénaéides en particulier font intervenir des mécanismes d’immunité inné cellulaires et humorals. Les hémocytes sont les principales cellules circulantes impliquées dans ces réactions.
Les réactions cellulaires sont la phagocytose, la formation des nodules et l’encapsulation, etc... tandis que les mécanismes humoraux font intervenir l’activation de la cascade prophenoloxydase et toutes les protéines immunitaires telles que les lysozymes, les lectines et tous les autres peptides antimicrobiens (Peneidines, Crustines, Hemocyanine, ALFs, etc...). 
Cependant, il n’est pas possible de définir lequel des deux mécanismes est le plus important pour la résistance aux maladies. Toutefois, la viabilité de la production dépend de l’équilibre qui existe entre : la qualité de l’environnement, la prévention des maladies grâce au diagnostic adéquat et les enquêtes épidémiologiques des pathogènes et de la santé des crevettes. Il est donc urgent de conduire des recherches vers la prévention des maladies et de proposer de nouvelles méthodes et concepts aux producteurs de crevettes.
De ce fait, dans le but de garantir la productivité et la pérennité de la filière pénéicole au Cameroun, la recherche doit être orientée vers la caractérisation fonctionnelle, biochimique et génétique des effecteurs de défense impliqués et exprimés dans la réponse aux infections pathogènes ou aux conditions de stress. L’on peut supposer que dans un futur proche, une production stable de crevettes pourra compter sur la domestication des souches de crevette sélectionnées non seulement pour leur adaptation aux conditions d’élevage mais certainement aussi des caractères immunitaires leur conférant une capacité à résister aux maladies. Ainsi, cet essor de la pénéiculture devrait non seulement réduire la faim et la malnutrition en offrant un aliment riche en protéines, en acides gras, en vitamines et en minéraux, mais améliorer aussi la sécurité alimentaire en créant des emplois et en accroissant les revenus.
Christian Delaunay